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Eau si claire et si pure
bienfaisante pour tous
j'aime ton doux murmure
d'où viens-tu dis-le nous
Je viens de la montagne
des glaciers azurés
et j'ai dans la campagne
arrosé les grands prés.
Je chantais cette chanson quand j'étais enfant. Avec mon père, nous allions à la montagne rôtir le saucisson et les pommes de terre. A l'heure de l'apéritif, il troublait son absinthe avec l'eau de la source qui jaillissait entre les racines d'un sapin. Pure et glacée, elle réveillait tous les arômes de la liqueur. A chaque gorgée, papa claquait de la langue pour exprimer le délice et sa satisfaction.
Aujourd'hui, la source est tarie. Mon imagination me dit qu'un géant est venu boire toute l'eau ou encore que la fée qui chantonnait cachée sous les gentianes et les fougères a déserté les lieux devenus inhospitaliers.
Alors, je suis partie à la recherche de sources dans les bois, dans les prés, au pied des collines et dans la plaine. Après bien des kilomètres à user mes souliers, j'ai trouvé un filet d'eau claire, un ru qui gazouille entre de grosses pierres avant de s'en aller chantant sur des galets terreux et moussus. En mouillant mes sandales et mes chaussettes sur les rives de ce petit caprice de la nature, j'ai découvert les yeux bleus de la pervenche, les corolles malicieuses des populages des marais, les étoiles de la véronique, la discrétion de la violette et l'exubérance jaune des lys d'eau, ou encore la timidité des impatientes «ne-me-touchez pas». J'ai été émue par la générosité de ce brin de rivière. Cette eau que nous exploitons de jour en jour, que nous utilisons, usons, mésusons, salissons, polluons, enterrons, canalisons, enfin que nous croyons éternelle et donc indigne de ménagement.Ces gouttes d'eau rassemblée donnent vie à des bouquets de fleurs, à des caches pour escargots, têtards, crapauds et grenouilles et en plus elles abreuvent les chevreuils, les lièvres, les geais et les coucous qui sonnent chaque printemps le réveil de la nature.
Sources, je vous demande pardon pour notre ingratitude. Nous sommes tout au début d'une prise de conscience de votre fragilité, de votre nécessité pour l'avenir de l'humanité. Serez-vous indulgentes envers notre ingratitude?