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La démocratie directe dont nous sommes si fiers présente forcément des chances et des risques. Heureux pays que celui dans lequel les citoyens peuvent décider, en dernier ressort, de la qualité des lois votées par les parlements démocratiquement élus! Heureux pays que celui dans lequel cent mille citoyens peuvent amener en débat populaire des propositions qui peuvent changer fondamentalement la Constitution. C’est là le signe que dans un tel pays, le peuple peut avoir le dernier mot, même s’il doit faire quelques efforts pour l’obtenir!
Mais le bonheur de vivre dans une démocratie s’accompagne aussi de certains risques. Les citoyens peuvent représenter, pour les partis politiques et les élus, autant de personnes à convaincre – ce qui est dans la nature même du processus démocratique – mais aussi parfois à séduire, ce qui peut l’être moins si la séduction devient un objectif en soit.
La démocratie comporte son lot de grandeur et de servitude. Elle n’est pas à l’abri de celles et ceux qui pourraient vouloir la dévoyer ou l’instrumentaliser pour leurs propres finalités. Le premier devoir des citoyens pourrait donc être de veiller à élire des personnes qui s’engagent à servir l’outil démocratique sans songer à se servir d’abord.
Il n’en va pas toujours ainsi. Nos institutions démocratiques n’échappent ni à la démagogie ni au populisme. Ces termes ne sont pas synonymes mais complémentaires. Le populisme, dans l’acception actuelle de ce terme, exprime l’idée d’un courant politique qui se proclame le défenseur du peuple contre les puissances d’argent et les étrangers, selon le dictionnaire encyclopédique de la langue française (Hachette). C’est dire que l’on peut être populiste de droite comme de gauche, suivant l’ennemi que l’on désigne.
Le populisme sait revêtir les habits qui plaisent, même si au fond d’eux, nombre de citoyens finissent par ne pas être dupes. Le populisme se nourrit des boucs émissaires qu’il désigne au gré des besoins. Il se nourrit des difficultés économiques et sociales et s’attache à les amplifier. Il divise pour mieux régner et ceux qui manient cette arme en politique peuvent difficilement s’en passer ensuite. On peut se demander d’ailleurs si un parti qui use régulièrement du populisme est encore un parti politique, capable de réfléchir, de faire des propositions et d’assumer une vraie fonction d’acteur dans la démocratie directe.
Quant à la démagogie, c’est une démarche tout aussi perverse si ce n’est davantage. Prendre le peuple en otage, prétendre représenter les citoyens alors que l’on espère régner en autocrate en prenant le peuple en otage.
Le plus grand danger, de tout cela, consiste, pour les partis et les élus politiques, à se laisser tenter par le succès que peuvent rencontrer les démagogues et les populistes. Et pourtant, il faut savoir résister, adopter, en politique, une éthique qui garantisse le respect des citoyennes et des citoyens. C’est le moins que l’on puisse attendre de nous, élus politiques!
Martine Brunschwig Graf, conseillère nationale libérale