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Avril 2019
La mort des langues
Auteur : Emilie Salamin-Amar

Depuis près de 5000 ans, les linguistes estiment qu’au moins 30.000 langues sont nées et disparues, bien souvent sans laisser de trace. Dernièrement, la mortalité des langues s’est accélérée, surtout depuis les conquêtes colonialistes européennes. Alors qu’en Europe on perdait une bonne dizaine de langues à cette époque, l’Australie et le Brésil, pour ne citer que ces deux pays, en perdaient plusieurs centaines. Ailleurs, dans le monde, et plus particulièrement en Afrique, plus de 200 langues ne sont plus pratiquées que par 500 locuteurs. C’est également le cas de très nombreuses langues amérindiennes ainsi que celles que l’on pratiquait dans des régions reculées de l’ex-URSS, ou encore en Chine (Ingouches, Kalmouts, Meckétiens, Nus, Achangs, etc.).

Il paraît qu’actuellement, une langue disparaît tous les quinze jours. Ce qui en fait 25 annuellement! Rien qu’en Indonésie, 300 des langues parlées sur 600 sont en train de mourir. Et l’hécatombe n’est pas terminée, plus des 860 langues pratiquées en Papouasie-Nouvelle-Guinée sont en voie d’extinction. L’Afrique et l’Inde utilisent plus fréquemment l’anglais au détriment de leurs multiples langues régionales, et ce depuis l’avènement de la mondialisation. Que de richesses perdues! Et dire que nous n’en sommes qu’au début.

Certains experts prévoient qu’au cours de notre siècle actuel, près de 50%, si ce n’est 90% des langues parlées sur notre planète auront disparu. Ce qui revient à dire que ce n’est pas loin de 3000 à 4000 qui partiront dans les oubliettes de la connaissance universelle. La mort des langues est malheureusement une conséquence inévitable de la suprématie des langues dites fortes dans cette arène linguistique ô combien meurtrière. L’avènement de l’informatique et de l’Internet va forcément accélérer ce processus destructeur dans les années à venir. Lorsqu’une langue meurt, ce n’est pas seulement un moyen de s’exprimer, de communiquer qui s’éteint, c’est toute une pensée, une culture, une autre vision du monde avec ses rites et ses croyances qui disparaissent avec elle.

© Emilie Salamin-Amar
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