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Tôt le matin, un tram fend la nuit froide et les passagers ont les yeux rivés sur l’écran de leur téléphone portable. Aucune parole, personne n’a sorti un livre ou déplié un journal, nul ne lève la tête à la recherche d’autres regards.
Le troupeau humain matinal a connecté son cerveau à un bidule électronique qui le formate pour une journée, laquelle s’annonce aussi peu palpitante que la consultation machinale de l’écran du petit appareil.
Voici l’humaine condition d’un être qui nourrit son imaginaire et parfois sa réflexion de jeux vidéo crétinisants et de réseaux sociaux qui font souvent ressortir de manière grossière le côté obscur et régressif de notre psyché.
Le mal est-il profond ou ne s’agit-il que d’un énième remède à une difficulté de vivre bien humaine, caractéristique de ce mammifère bipède doté d’un cortex surdimensionné dont il ne sait pas toujours quoi faire, préférant l’imbiber d’alcool ou d’idioties visuelles, l’enfumer aux psychotropes ou aux discours démagogiques plutôt que de s’en servir à poétiser le monde, le rendre meilleur voire le sauver de la démesure mortifère de sa part sombre, avec son cortège de destructions humaines et naturelles?
Quand les jours s’allongent et que le tram traverse des paysages qui brillent, magnifiés par un soleil naissant qui règne de nouveau en maître dans le ciel de notre coin de pays, les têtes se détournent de plus en plus du prolongement de leurs doigts impatients, le gadget électronique est laissé au repos au fond d’une poche ou ne sert plus que de relais à une musique choisie pour débuter la journée de la plus agréable des manières; de souriantes discussions s’ébauchent, même si les esprits semblent encore embués de sommeil.
Comme les journaux gratuits il y a quelques années, c’est bientôt au tour des téléphones portables d’être passés de mode: la femme et l’homme modernes gardent cette propension immémoriale et infantile à ne rater aucun effet de mode, avant de s’en débarrasser aussi vite qu’ils l’avaient embrassé, pour se précipiter sur une nouveauté qui ne sera jamais bien longtemps la dernière.
Nous sommes de drôles d’animaux, à la fois inconsistants et attachants, capables de robotiser et de numériser de plus en plus notre quotidien, mais qui restons tributaires de notre nature espiègle, curieuse, conviviale et grégaire!
John Vuillaume