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Ex-coordinateur de la défunte campagne «Prudence OGM» du CENAC (Centre pour l'Action Non-violente, ex-CMLK), je désire apporter quelques réserves à l'article de Samuel Bonstein – pourtant un ami – dans l'essor d'avril 2014, complétant au passage les analyses de Georges Tafelmacher – autre ami! – dans le même numéro.
Commençons par un des rares problèmes reconnu par l'auteur: oui, «la création et la commercialisation des semences OGM sont l'apanage d'une dizaine de multinationales dont le but est avant tout le profit». C'est même, à mon sens, le nœud du problème: ces firmes, engageant des sommes colossales dans la recherche de semences génétiquement modifiées, sont bien déterminées à rentrer dans leurs fonds et à engranger des bénéfices, coûte que coûte. C'est leur unique vocation! Quant aux recherches publiques, que l'auteur appelle à la rescousse, qu'il me soit permis de rappeler qu'elles sont menées avec nos sous – via l'impôt – et, par conséquent, de revendiquer un droit de regard sur leurs objectifs.
Le but à long terme des multinationales, via les OGM, est de contrôler massivement le marché mondial des semences et d'imposer l'usage massif de produits phytosanitaires associés aux OGM vendus – produits dont la toxicité pour l'homme n'est plus à démontrer. Jusqu'il y a peu, l'humanité s'est nourrie de plantes dont les semences étaient soigneusement sélectionnées par des paysans, des firmes ou des organismes publics de recherche agricole, en fonction de critères environnementaux et sociaux. Des milliers de variétés sont ainsi nées, trésor de diversité biologique.
Car si M. Bonstein reconnaît que «le génie génétique n'empêche pas l'apparition occasionnelle de résistance des ravageurs aux produits phytosanitaires», son propos est encore ingénu: ce qu'il faut écrire, c'est que le génie génétique provoque l'apparition massive et dévastatrice de résistance des ravageurs. La preuve en est apportée par les résultats archi-décevants de l'implantation d'OGM dans nombre de pays: à quelques années triomphales (mais au prix d'achats massifs de pesticides) succède régulièrement une baisse drastique des rendements, qui a déjà mené à la ruine des dizaines de milliers de paysans. Même aux Etats-Unis, de nombreux agriculteurs reconnaissent désormais ce fait!
Quant aux plantes résistant soi-disant à la sécheresse, aux variétés enrichies en vitamines, etc., depuis le début des OGM le discours nous abreuve de ces espoirs philanthropiques, alors que, encore et toujours, les plantes GM produites ne sont que de deux sortes: celles qui supportent un ou plusieurs herbicides (le type «Roundup ready») et celles qui produisent un insecticide (le type «Bt»). Et la faim dans le monde n'est pas une question de production alimentaire insuffisante, mais d'accès à la nourriture et de pouvoir d'achat…
Une production écologique peut produire plus, à meilleur marché, plus sainement. C'est ce qu'attestent, par exemple, les 400 chercheurs indépendants réunis au sein de l'IAASTD, qui «désigne l'agriculture biologique et les méthodes agro-écologiques comme étant les voies à suivre pour garantir le futur de l'approvisionnement agricole mondial»1. Quant à prétendre que le Programme national de recherche PNR59 a «conclu que la sélection par génie génétique ne présente pas plus de risque pour les êtres humains et leur environnement que la sélection conventionnelle», c'est se laisser abuser: le PNR59 ne comprenait aucune recherche sur la sécurité sanitaire des OGM; pas étonnant qu'il n'ait démontré aucune dangerosité particulière! Pour conclure, j'aimerais rappeler l'enjeu ultime de ce combat2:
Ou, pour le résumer en deux mots: c'est agro-industrie contre agro-écologie.
Alors: «combat d'arrière-garde», le refus des OGM ? Le lecteur jugera. Pour ma part, c'est un certain scientisme qui me semble d'arrière-garde, voué à une adulation naïve de toute nouveauté présentée comme «progrès».
1 Selon Le Temps du 18.10.2013. 2 Pour plus d’information, on peut consulter le site du CENAC, www.non-violence.ch > S’informer > Prudence OGM