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Juin 2011
L’école selon Ivan Illich
Auteur : Jean-Michel Corajoud
Ce texte est un bref résumé de l'article
qui nous a été aimablement envoyé par
Jean-Michel Corajoud, du Cercle des
lecteurs d'Ivan Illich, Lausanne.

    
En 1971 paraît le livre d'Ivan Illich, Une société sans école (Seuil, Paris). Son titre est trompeur car il laisse entendre que l'auteur est opposé à toute école. En fait, Illich conteste le monopole de l'école obligatoire qui, seule, s'arroge le droit de décider si une personne peut exercer le métier qu'elle a choisi. Le titre original en anglais était plus juste: Deschooling society (Une société déscolarisée). L'école obligatoire conduit à un double échec, technique et social, car «le rite de la scolarité ne sert ni à l'acquisition individuelle des connaissances, ni l'égalité sociale».

Echec de l'acquisition individuelle des connaissances – L'enseignement est déconnecté du vécu des élèves, ce qui les démotive: «Où avons-nous appris la plus grande part de ce que nous savons? En dehors de l'école. C'est sorti de l'école, ou en dehors, que tout le monde apprend à vivre, apprend à parler, à penser, à aimer, à sentir, à jouer, à  se débrouiller, à travailler». A tort, l'école nous dit: «Apprends d'abord pour pouvoir ensuite entreprendre», alors que la motivation serait grande si, au contraire, on nous permettait d'entreprendre avant d'apprendre pour comprendre. Et donc, dit Illich: «C'est ainsi que l'éducation devint l'opposé de la compétence acquise dans la vie quotidienne, qu'elle finit par signifier une méthode de traitement plutôt que le simple savoir des faits de l'existence et la capacité de se servir des outils qui façonnent la vie concrète de l'homme».

Inégalités sociales – L'école aggrave les inégalités plutôt qu'elle les élimine. En effet, les pauvres ont moins de chance de faire des études longues, pas seulement pour des raisons économiques, mais surtout parce qu'au départ l'enfant issu d'un milieu privilégié «bénéficie des possibilités de lecture qu'il trouve dans son milieu familial. (…) De façon comparable, l'étudiant le plus pauvre prend généralement du retard dans la mesure où il dépend entièrement de l'université pour sa promotion sociale ou l'amélioration de ses connaissances».

Et comme le salut économique futur n'appartient qu'à ceux qui accumulent les années d'études, il est clair que «la grâce n'est maintenant accordée qu'à ceux qui accumulent ces années d'école» et, simultanément, qu'«aucune issue ne s'offre au laissé-pour-compte de l'école».

Qu'apprend-on à l'école? – En 1973, Illich écrit La Convivialité où il poursuit sa critique de l'école obligatoire: «Ce qu'enseigne le maître n'a guère d'importance dès lors que les enfants doivent passer des centaines d'heures assemblés par classes d'âges, entrer dans la routine du programme (le parcours ou curriculum), et recevoir un diplôme en fonction de leur capacité à s'y soumettre. Qu'apprend-on à l'école? On apprend que plus on y passe d'heures, plus on vaut cher sur le marché. On apprend à valoriser la consommation échelonnée de programmes. On apprend à valoriser l'avancement hiérarchique, la soumission et la passivité, et même la déviance-type que le maître interprétera comme symptôme de créativité. On apprend à briguer sans discipline les faveurs du bureaucrate qui préside aux séances quotidiennes, à l'école le professeur, à l'usine le patron. On apprend à se définir comme détenteur d'un stock de savoir dans la spécialité où l'on a investi son temps. On apprend, enfin, à accepter sans broncher sa place dans la société, à savoir la classe et la carrière précises qui correspondent respectivement au niveau et au champ de spécialisation scolaire».

(…)

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