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«Ah monsieur d’Ormesson
Vous osez déclarer
Qu’un air de liberté flottait sur Saïgon
Avant que cette ville
S’appelle Ville Ho-Chi-Minh».
C’est en entendant Jean Ferrat chanter cette chanson dans les années 70 que j’ai appris l’existence de l’académicien Jean d’Ormesson, directeur du Figaro. Il m’a donc immédiatement été peu fréquentable. Puis, par hasard, j’ai repéré «Au plaisir de Dieu» dans une brocante. Le recul critique de ce Jean d’Ormesson à l’endroit de sa famille me l’a rendu sympathique et j’ai fini par lire un bon nombre de ses bouquins.
Il est mort l’an dernier, mais il publie toujours… Le dernier, «Et moi, je vis toujours» raconte l’histoire de l’humanité en commentant ses grandes avancées. J’y ai trouvé des passages dignes d’être soulignés. Le premier a une saveur particulière en se disant que du temps où il dirigeait le Figaro, il n’aurait pas osé signer de telles lignes et qu’il a attendu d’être de «l’autre côté» pour enfin oser:
«La bourgeoisie a volé au peuple la révolution qu’elle a accomplie en son nom… Beaucoup de définitions ont été données du bourgeois. Il est réservé et il a des réserves. Il ne s’engage jamais tout entier. Il a plus d’intérêts que d’idéal. Il aime le confort et il est conformiste. Il est prudent, sûr de lui, parfois chafouin, affolé de culture, près de ses sous. Il se réclame d’un passé plutôt récent, d’un art souvent moderne pour essayer de donner le change, de la tradition, de la beauté. Il tente toujours de passer pour audacieux, mais il craint l’avenir, les artistes et l’amour. Il est plus familier des banques et des assurances que de l’agriculture et de la pêche en haute mer. Tout tient en un seul mot: l’argent.»
François Mitterrand l’a invité 36 fois pendant son séjour de 14 ans à l’Elysée. Il lui aurait dit qu’il était un homme de gauche et un polémiste de droite. C’est vrai que je n’ai pas pu aller loin dans le bouquin où il a regroupé les diatribes qu’il adressait au Président au titre de patron du Figaro. Mais je voudrais vous faire partager encore les lignes suivantes qui me semblent tellement importantes:
«Jésus est le révolutionnaire le plus radical que j’aie jamais connu. Il est permis de soutenir que le christianisme constitue la révolution la plus ambitieuse et peut-être la plus réussie de tous les temps. A une époque partagée entre citoyens libres et esclaves, où les puissants ont tous les droits et les plus pauvres aucun et où les femmes sont soumises à la volonté des hommes, Jésus prêche la dignité des pauvres, l’égalité entre tous les hommes, l’émancipation des femmes. Autant peut-être que Jean, son disciple préféré, il aime Marie-Madeleine, une ancienne prostituée. Dans le monde impérial et romain si fortement hiérarchisé, où seule compte la puissance, il lance une idée folle: il faut aimer les autres, il faut aimer jusqu’à ses ennemis. Jésus est avec évidence l’annonciateur et l’ancêtre du socialisme. Il a changé plus que personne l’image du monde à venir.»