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Egalité hommes-femmes… un thème que l’on peut aborder sous de nombreux aspects! Le plus souvent traité, c’est l’égalité salariale, laquelle est encore loin d’être la règle, même si des progrès ont déjà été réalisés.
Il m’a paru plus intéressant de voir l’aspect relationnel. Et de prendre pour sujet les relations entre hommes et femmes dans la vie politique, cette carrière n’étant ouverte aux femmes que depuis l’introduction du suffrage féminin. Des onze femmes alors élues en 1971, leur nombre a sextuplé aux Chambres fédérales. Cependant le Parlement reste encore un fief essentiellement masculin.
Pour évaluer l’évolution des relations hommes-femmes au Parlement, j’ai pris contact avec deux conseillères nationales vaudoises socialistes de générations différentes: d’abord avec Josiane Aubert et, sur sa proposition, avec Rebecca Ruiz.
Josiane Aubert, licenciée en sciences, a fait une carrière dans l’enseignement secondaire avant de s’engager en politique en 1992. Elle a gravi tous les échelons: conseillère communale, députée au Grand Conseil, présidente du Parti socialiste, membre de la Constituante, puis conseillère nationale de 2007 à 2014, année de sa démission.
D‘environ 30 ans plus jeune que Josiane Aubert, Rebecca Ruiz, diplômée en sciences sociales de l’UNIL, est collaboratrice scientifique et criminologue. Entrée au Conseil communal de Lausanne en 1996, puis députée au Grand Conseil, elle remplace Josiane Aubert au Conseil national dès 2014. Elle est membre de la Commission juridique.
Je leur ai posé trois questions auxquelles elles m’ont répondu par écrit sans se concerter. Voici leurs réponses respectives:
Josiane Aubert (JA) – L’arrivée au Parlement fédéral se fait graduellement, nous ne sommes pas catapultés d’un coup au Conseil national. Dans mon cas, j’ai vécu d’abord deux ans et demi de Constituante vaudoise, puis cinq ans de Grand Conseil avant d’arriver à Berne. L’acclimatation dans le monde politique encore très majoritairement masculin (environ 30% de femmes à Berne) se fait donc graduellement. Dans l’ensemble, les hommes sont très corrects à notre égard, mais ils ont une grande habitude à jouer des coudes et à s’imposer. J’ai donc dû apprendre à me mettre en avant pour exister et défendre mes idées.
Rebecca Ruiz (RR) – Mes impressions ont été excellentes même si j’étais très impressionnée par le cadre imposant du Palais fédéral. J’étais aussi très émue de pouvoir accéder à cette fonction. L’accueil de la part de mes collègues a été parfait. Mes collègues de parti vaudoises et vaudois m’ont tout de suite tout expliqué et montré les incontournables.
Lorsqu’on fait de la politique et qu’on est femme on observe inévitablement des comportements ou des attitudes à notre égard qui ne sont pas les mêmes que ceux qui s’opèrent vis-à-vis de nos collègues masculins. Mais ces petites choses surviennent le plus souvent dans des cadres informels, jamais lors de débats au plénum du Conseil national ou au sein des commissions parlementaires. Heureusement, cela reste marginal!
JA – Je n’ai pas d’anecdote qui relate un affrontement frontal avec un ou des collègues masculins dû à mon appartenance à la gent féminine. La problématique est plus subtile… Par exemple, lorsqu’une thématique liée aux femmes est débattue, les fronts se durcissent, les regards et les arguments d’une majorité des hommes politiciens deviennent condescendants ou agressifs, c’est selon. Je peux citer dans ce registre les subventions pour la création de structures d’accueil pour les jeunes enfants, la lutte contre l’excision, l’introduction de mesures coercitives contre les entreprises qui n’appliquent pas l’égalité salariales, la valorisation du travail à temps partiel dans les assurances sociales, etc…). A cet égard, le débat au Conseil national sur la lutte contre l’excision a donné lieu à des interventions épiques de collègues masculins, comparant l’excision à cette terrible mutilation masculine qu’est la circoncision! Et appelant l’assemblée à ne pas agir contre l’une sans agir contre l’autre aussi! Le rôle de mâle était atteint dans sa chair.
RR – Les collègues masculins sont pour la plupart extrêmement polis et respectueux. J’ai toutefois entendu des remarques sur d’autres collègues féminines totalement déplacées, portant sur leurs attributs physiques, leur maquillage ou sur leur mode vestimentaire. Ce qu’on n’entendra jamais sur un homme.
Les expériences personnelles plus désagréables que j’ai vécues n’étaient pas le fait de collègues mais plutôt de personnes extérieures à la politique. J’ai à ce titre un exemple récent. Il y a quelques semaines j’ai dû faire un discours lors d’une remise de prix. Un autre de mes collègues du Conseil national était présent. Lorsqu’il a été appelé sur scène, on l’a invité à le faire en lui disant: «Monsieur le Conseiller national». Lorsque j’ai été appelée, on m’a dit: «Rebecca, c’est à vous». Qu’est-ce qui justifie que je me fasse nommer par mon prénom alors que mon collègue est interpellé à travers sa fonction, qui est la même que la mienne? Rien, si ce n’est que je suis une jeune femme à mon sens.
JA – Les femmes sont généralement plus directes dans la résolution de conflits et mettent plus facilement sur la table les problèmes relationnels ou de gouvernance; elles les affrontent en face alors que les collègues masculins auraient potentiellement tendance à les mettre sous le tapis… J’ai vécu de nombreuses situations de ce type, qui met en évidence que la présence équilibrée de femmes dans les assemblées politiques et dans les sphères dirigeantes est souhaitable et bénéfique. A mes yeux, la complémentarité d’approches entre hommes et femmes est très positive.
RR – J’ai d’excellentes relations avec mes collègues masculins. Je n’ai toutefois pas d’expérience positive particulière à relever du fait que je suis une femme. Je ne m’attends d’ailleurs pas et ne souhaite pas bénéficier d’avantages en raison de mon sexe. Personnellement, je travaille consciencieusement mes dossiers et indépendamment du sexe, c’est par ce biais que j’estime faire un travail respectable et méritant attention et écoute.
À chacun de vous, lectrice, lecteur, d’en tirer vos conclusions!