Le thème des étrangers a inspiré trois de nos lecteurs ou membres du comité rédactionnel.
Leurs contributions permettent d’aborder le problème en poésie, tout en suscitant la réflexion.
Un jour le ciel s'est écrasé
De tout son bleu de jour
De tout son noir de nuit
Sur la maison de mes vingt ans.
La poussière de ses ruines
M'a chassé loin des miens,
Du foyer de l'enfance
Aux couleurs de jeunesse,
Vers les grands océans,
Où je devins un émigrant.
Le ciel, un jour, tombé
De tout son poids de mort,
De tout son poids de vie
Sur la musique du passé
Torturant ma nouvelle sente,
Modulant ma voix,
S'empara de l'air de mes mots.
J'entrais dans le silence.
D'un langage inconnu.
Ainsi je naissais étranger.
Lorsque le ciel a fait de moi,
Enfant de la campagne,
Un ouvrier d'usine
Qui rêve d'une terre arable
Où planter une fleur,
Où cueillir un raisin
Et qui dans le sommeil
Visite ses champs
Afin de n'être d'eux jamais oublié,
J'ai pleuré, le cœur nostalgique.
Refrain:
Sur toutes les routes du monde
La vie se prend à pleines mains
Aux branches de la destinée.
Le jour où le ciel chuchota:
Émigrant, étranger,
Toi, fils de la Terre,
Choisis donc où construire
La maison, le berceau
D'une grande famille,
Et avance sur le chemin
Agité par l'amour naissant,
L’amour tissant sa toile.
Besogneux, j'ai cherché ma voie.
L'écho du ciel guidait mes pas
Elargissait mon âme
Et j'ai trouvé la joie
De reconnaître comme miens
Le soleil et la pluie,
La lune et les étoiles
Qui ne m'avaient abandonné.
Les racines croissaient
Dans le nouveau pays.
Je devins fils des galaxies.
Alors mon ciel s'est rallumé
D'une lumière nouvelle:
Vive, elle éclaire en moi
L'apprivoisement.
Riche de souvenirs,
De bonheurs à donner
Et fidèle au feu de mes vingt ans,
Celui qui m'a fait homme,
De tout cœur je salue
Les horizons de deux patries.